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Les glaces de l'Arctique fondent plus vite que
prévu. Pour la première fois, le pôle Nord n'est plus relié à la terre
ferme.
O.A.
13 Septembre 2008
On se réjouit souvent des premières fois. Premier baiser, première voiture,
première fois sur la lune...
Mais il en est certaines qui sont inquiétantes, comme celle de ce début
septembre : le pôle Nord est pour la première fois en eau libre. On peut
désormais faire le tour complet de cette calotte en bateau.
Jusqu'à présent, la couche de glace de la banquise n'avait jamais cédé
simultanément le long des côtes sibériennes et canadiennes. Le Centre
national américain de la neige et de la glace (NSIDC) vient de révéler que
c'était chose faite.
Selon Étienne Berthier, glaciologue au CNRS (Legos) de Toulouse, « ce
phénomène est une réponse au changement climatique global, et on peut être
pessimiste ». Certains experts prédisent la disparition complète de la
banquise aux alentours de 2020.
« On avait depuis 20 ans une décroissance linéaire » de la banquise,
témoigne le chercheur toulousain. « 2007 avait été très déficitaire (NDLR :
le record absolu de fonte des glaces, 40 % de moins que la superficie
moyenne des vingt dernières années) on ne s'y attendait et on pensait à un
artefact. Force est de constater que 2008 confirme cette accélération. Ceci
noircit le tableau pour l'avenir ». |
La fonte de la banquise du pôle Nord
ne joue pas de rôle direct dans la montée du niveau des océans (l'eau occupe
la même place que lorsqu'elle était glace). En revanche, elle intervient
dans le réchauffement climatique. « Il renvoie l'énergie solaire, alors que
l'eau la garde. Donc en remplaçant la banquise par des mers, on amplifie le
réchauffement général ».
Pour Étienne Berthier, la disparition des glaces au pôle Nord « doit être
prise comme un signal d'alarme. On considère le pôle Nord comme le canari
dans les mines de charbon ». Sous-entendu, le dernier avertissement avant
l'explosion. La dernière chance.
Il est donc plus que temps. « Car avant que des décisions soient prises et
appliquées à l'échelon international - et on en est loin - et en prenant en
compte l'effet d'inertie, le réchauffement climatique se poursuivra
longtemps encore ».
Tant que le cout financier du dérèglement climatique n'apparait ra pas
clairement comme insupportable, il y a peu de chance que les choses
changent. Ou alors ce sera une question de survie.
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Une réserve de ressources énergétiques
Si l'Antarctique (au Sud) est protégé par un traité international, il n'en
est rien pour l'Arctique. Aussi, les cinq pays riverains du pôle Nord
(Russie, États-Unis, Canada, Norvège et Danemark) se livrent-ils une course
à la conquête, à la revendication, avec en ligne de mire d'énormes
ressources énergétiques coincées dans les grands fonds, mais techniquement
exploitables.
Il faut dire que selon les dernières estimations d'experts gouvernementaux
américains, l'Arctique recèlerait « 22 % des ressources énergétiques non
découvertes mais exploitables » de la planète. On y trouverait l'équivalent
de 90 milliards de barils de pétrole, 47 milliards de m3 de gaz naturel et
44 milliards de m3 de gaz naturel liquéfié. Sans compter les gisements d'or,
diamants, nickel, fer, etc. De quoi aiguiser des appétits. Tout comme la
possibilité pour les navires marchands de relier Atlantique et Pacifique en
gagnant 5000km par rapport aux routes habituelles.
Et l'environnement dans tout ça ? Probablement sacrifié sur l'autel de la
consommation à outrance. Jusqu'à ce qu'il soit trop tard.
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