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Par Marie Martin-Pécheux Webmestre de www.citerre.org
La notion de croissance implique qu'un
corps peut croitre indéfiniment, comme un ballon qui poursuit son expansion
jusqu'à l'infini, alors que notre Terre est limitée en taille, et en
ressources. Nous le constatons depuis une cinquantaine d'années, elle ne
peut plus supporter nos impacts dévastateurs. Comme la grenouille de la
fable, qui voulait se faire plus grosse que le boeuf, elle risque bien
d'exploser de notre inconscience ! |
Un enfant, par le biais de la nourriture,
construit une à une les cellules de son corps, développe ses organes et
grandit. Ce qui caractérise un enfant, entre autres, c'est son incapacité à
assumer seul ses besoins : pour ceux-ci, il est dépendant des autres, des
adultes. Le jour où la croissance se termine, il a acquis son autonomie, il
a pour devoir de se maintenir en bonne santé, et de passer de la
construction matérielle de son corps à la construction intellectuelle de son
esprit.
Pour notre société, c'est comparable : nous avons matériellement atteint notre taille adulte car nous sommes en mesure de répondre à tous nos besoins matériels. En réalité la "course à la Croissance" est un mode de fonctionnement dû, directement, à la démence du système monétaire : « Dans notre système, la croissance est rendu indispensable par le fait que l'argent créé est temporaire et que les banques ne créent que le capital emprunté, pas les intérêts. Dans ces conditions, et pour que le système fonctionne, nous sommes condamnés à une fuite en avant : il faut créer chaque année plus d'argent que la précédente afin qu'il y ait assez en circulation pour permettre le remboursement du principal... et des intérêts ! » (Philippe Derudder - « Les trente mutantes ») Nous ne pourrons en sortir, vraisemblablement, qu'en réformant le système monétaire. De même qui donc pourrait dire que ce n'est pas une bonne chose le « développement durable » ? On va apporter la Science, le sacro-saint Progrès - autre concept largement sujet à controverse -, l'éducation occidentale, la médecine occidentale, la technologie occidentale, la culture occidentale, les solutions occidentales... Celui qui ose remettre en cause le Progrès, le Développement ne peut être qu'un réactionnaire, un tenant de l'archaïsme, voire un dangereux passéiste... Quand on parle de « développement durable, soutenable », on parle d'un développement axé sur le matériel, le bien-être technologique, la consommation sans limite (rappelons-nous : « six milliards d'acheteurs potentiels, quelle aubaine !») en respectant la nature, bien sûr... comme s'il était possible de la respecter dans le modèle occidental fondé sur une rationalité schizophréniante et sur une séparation avec la nature... Le problème est que, de plus en plus, ce terme permet une mystification conceptuelle, destinée en fait à étendre l'impact d'une pensée économique agressive... et d'une pensée culturelle dominante, ce qui est peut-être plus grave encore. Pour de nombreux auteurs il est temps de remettre en cause ce concept même... « Il n'y a pas le moindre doute que le développement durable est l'un des concepts les plus nuisibles ». . . (Nicholas Georgescu-Roegen,1991) Plutôt que de développement, il est temps, et enfin, de parler de SOLIDARITE DURABLE... Tout comme une nourriture surabondante encrasse le corps, un progrès uniquement fondé sur la consommation des objets menace la santé de la société par encrassement (accumulation d'objets inutiles, course vers la mode, abêtissement général, gâchisd'énergie et de travail...) et par pollution du milieu extérieur (trop de déchets, déchets toxiques, changement climatique). La Croissance équivaut à manger, manger sans cesse, sans satisfaction véritable... Les articulations se remplissent de déchets toxiques et le ventre de mauvaises graisses, de métaux et de molécules de plastiques, tandis que la tâche à effectuer est stupide, répétitive, sans intérêt, sans avenir, sous-payée, voire pire. Par ailleurs, un garrot ligote un ou plusieurs membres, pour une rétention du sang-monnaie au profit d'un autre membre, entraînant inévitablement une gangrène. Et pendant ce temps-là, nulle nourriture intellectuelle, culturelle, ou si peu, ne vient nourrir l'Esprit. Les besoins affectifs ne sont absolument pas comblés. Notre société est donc comme un adulte toujours en manque, débile, inculte et malheureux, au corps encrassé, gonflant comme une baudruche, avec un risque d'amputation certain. La consommation pour la consommation n'a aucun sens, elle est même dangereuse. En produisant une insatisfaction perpétuelle avec le matraquage publicitaire omniprésent, elle met en péril l'environnement, et pose le risque non négligeable du tarissement définitif des ressources nécessaires à sa survie. S'il y a consommation, celle-ci doit donc être en stricte adéquation avec les besoins réels et les possibilités de la Terre. Toute consommation des ressources doit être compensée par une restauration équivalente voire supérieure de ces mêmes ressources. Clairement, dans une logique purement bioéconomique, le mythe de la croissance doit être dénoncé vigoureusement,tout au moins celui de la croissance matérielle. Car indéniablement, si nous avons achevé la croissance du corps social, nous sommes loin d'avoir achevé la croissance de son esprit ou de son intelligence affective ! La seule croissance possible n'est donc pas matérielle mais immatérielle. Les besoins affectifs, intellectuels, spirituels (au sens large), eux ne sont jamais comblés, car, contrairement au corps, c'est dans la nature même de l'esprit de s'accroitre sans limite. La croissance matérielle doit être remplacée par la croissance immatérielle. La croissance des biens immatériels est sans limite. Seul le développement des services, des métiers du bien-être, seule une décroissance matérielle et une croissance immatérielle seront donc favorables à la vie. Dans les pays où la croissance matérielle atteint déjà des limites inacceptables en terme d'impact environnemental, la décroissance respectueuse doit être urgente et importante. Dans les pays où les besoins premiers ne sont pas résolus, du fait du manque de volonté politique, une croissance matérielle est encore nécessaire pour les besoins vitaux, mais celle-ci doit se faire dans le respect de l'environnement. Tant qu'il y aura des humains pour assouvir les besoins immatériels, la croissance immatérielle étant sans limite, il n'y a aucune raison qu'existe un quelconque chômage et une récession. Au contraire ! Un âge d'or s'ouvre devant nous, véritablement, mais c'est celui de l'or immatériel, pas matériel. Nous devons simplement changer de priorité, et que nos politiciens intègrent la notion de bien-être au lieu de bien-avoir. [1] « Pour la décroissance soutenable, il faut également relocaliser l'économie, faciliter l'installation de petites structures agricoles à taille humaine et renoncer à ces monstruosités industrielles où des millions de créatures perçues comme des protéines souffrent le martyre pour alimenter nos insatiables mandibules » (Pierre Rabhi) [2] 762 espèces de plantes et d'animaux sont maintenant considérées comme éteintes. 58 espèces survivent encore, seulement en culture ou en captivité. 12 259 espèces sont menacées d'extinction immédiate (en danger critique d'extinction, en danger ou vulnérables). (Source : Liste rouge de l'UICN Union mondiale pour la nature (2003))
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